lundi 17 juillet 2017

900 jours à crever de faim

J’ai visité plusieurs endroits ayant un lien avec la Deuxième Guerre mondiale. Je l’ai déjà dit, ce sujet me passionne de plus en plus, en vieillissant. Au point où quand j’aurai le temps, j’aimerais retourner à l’université pour en apprendre plus. Mais d’ici là – parce que ça peut être long! – j’apprends sur le terrain.

À St-Pétersbourg, j’ai appris une histoire que j’ignorais jusque-là. Une amie qui a déjà visité cette ville m’a parlé d’un musée, le State Memorial Museum of Leningrad Defense and Blockade. C’est un musée qui ne se trouvait même pas dans mon guide. On y raconte comment la ville a «survécu» à un siège de près de 900 jours au cours desquels le but de Hitler et de ses troupes était carrément d’anéantir les Soviétiques de Leningrad (ancien nom de St-Pétersbourg) en laissant les habitants crever de faim. Le cauchemar a officiellement commencé le 8 septembre 1941.

Plusieurs ont réussi à s’échapper avant que la ville soit complètement encerclée et on évacuait les enfants par centaine. Au total pendant le siège, il y a eu trois grandes vagues d’évacuation, par la mer. Mais même plusieurs milliers de ces gens ont péri.
Je ne me perdrai pas dans les explications historiques, mais les Allemands ont d’abord coupé la voie ferrée, puis la voie terrestre qui reliaient Leningrad au reste du pays – et du monde. Il ne leur restait qu’une route par la mer, surnommée la «route de la vie», mais qui n’était pas navigable pendant la période de gel et de dégel.

Pas de ravitaillement possible, donc. Le décompte des vivres a rapidement été fait et on a rationné le tout. La nourriture distribuée frôlait le ridicule. Qu’un minime 250 gr de pain (si on peut appeler ça du pain) est offert aux adultes par jour, 150 gr pour les enfants. Ces portions ne feront que diminuer au fil du temps.
Les semences pour le printemps suivant étaient gardées par le «keeper of the seeds». Malheureusement, même quelques-uns d’entre eux n’ont pas survécu à l’hiver.

Les habitants perdent l’électricité, et donc le chauffage, et l’accès à l’eau. Parfois, pour réchauffer la maison, la seule façon était de faire chauffer quelque chose dans une espèce de chaudron. Tout y passait. Livres, meubles, n’importe quoi qui puisse brûler.

On tente de préserver les œuvres d’art, les statues, en les enterrant. Le palais de Catherine, que j’ai visité et dont je vous parlerai plus tard, a été grandement atteint par les bombes. Mais ils ont réussi à sauver pas mal d’objets ainsi.

Pour ce qui est de la bouffe, on tentait tant bien que mal de trouver de quoi manger. De la colle, des ceintures en cuir, les pigeons, des chats… Les victimes se comptaient tout de même par milliers par jour.

Sur la photo ci-bas, on voit la même femme, sur une période d’un an et demi.
Malgré tout, la ville a continué à se battre. Les usines ont été transformées et ont pris un virage pour produire le nécessaire de guerre avec les moyens disponibles. L’armée russe a construit un chemin de fer en 17 jours à un certain moment dans une brèche.

Les écoles et les universités n’ont jamais fermé. On continuait à former des ingénieurs, des médecins, toutes les professions qui seraient utiles en temps de crise.

L’orchestre symphonique avait à un moment perdu 27 de ses artistes. Mais elle a continué ses performances pour divertir et donner un peu de bonheur aux habitants. Un jour, il n’y avait plus d’électricité, alors les répétitions n’étaient plus possibles. Elles ont été déplacées le jour, à la clarté. On poursuivait aussi les compétitions sportives, même si les civils n’avaient plus la force de pratiquer des sports.

Les chiffres varient d’une source à l’autre, mais cet événement aurait provoqué la mort d’environ 1,8 million de Soviétiques, dont un million de civils. À la fin, la population de Leningrad et des environs était passée de 4 millions d’habitants à 800 000.
Le 27 janvier 1944, les habitants ont appris par la radio que le siège était enfin terminé. Mais la ville était détruite. Résilients, les Soviétiques se sont à nouveau unis pour reconstruire leur ville, leur vie. Malgré tout, des milliers d’autres mourront dans des explosions de mines laissées par les Allemands, sur le chemin du retour…

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