Partir pour aller voir les mystiques pyramides d'Égypte, c'est s'attendre à réaliser un rêve, à vivre des instants magiques.
Mais ça vient aussi avec un bémol. C'est qu'un certain stress planait
autour de mon périple au Caire. Avec tout ce qui se passe présentement dans le monde, avec
les frontières qui sont dangereuses dans tout ce qui est «près» de la Syrie, ce
ne sont pas nécessairement les endroits les plus attrayants pour un voyage. Surtout
pour une fille, surtout si elle voyage en solo.
Le tourisme étant en très forte baisse là-bas, j’ai trouvé
un hôtel cinq étoiles à deux pas des pyramides pour un prix ridicule. Je me
suis même permis de payer un petit extra pour avoir une vue sur les pyramides
de mon balcon. Tant qu’à y être! Je me demandais bien ce que ça allait donner
une fois sur place puisque le prix n’allait pas du tout avec le nombre d’étoiles,
mais je n’ai pas été déçue, car voici la vue que j’avais :
Mais avant d’arriver dans cette magnifique chambre, j’ai vécu quelques périodes d’angoisse. Et je ne parle même pas de toutes les personnes qui m’ont lancé des «Ouf, tu es courageuse» avant de partir.
Commençons par l’arrivée à l’aéroport.
Bon, je dis aéroport, mais je ne suis pas certaine que ça mérite ce mot. C’était plutôt comme un vieux gymnase d’école primaire avec des petites cabines pour les douaniers. Je me mets en ligne et j’attends. Longtemps.
Une fois que c’est à mon tour, il fouille dans les pages de mon passeport et me dit «tu n’as pas de visa?» Merde. J’ai complètement oublié de vérifier ça – oui, ça m’arrive de ne pas être à la hauteur côté planification et ce voyage est mon top 1 dans cette catégorie. Pas grave, je dois juste aller en acheter un à l’autre bout de la pièce, là où derrière une vitre sale sous l’écriteau «Travelers' choice» se trouve un bureau de change. À noter ici que «visa» veut tout simplement dire «payer 25 USD pour entrer dans le pays».
Je sors ma carte de crédit, ne sachant pas que puisque c’est un bureau de change et que ma carte ne fait aucune différence, j’allais avoir des frais supplémentaires de 5$, cela étant considéré comme une avance de fonds.
Bref, je reviens, fais étamper mon passeport et me dirige vers la sortie. Au loin, je vois des kiosques de compagnies cellulaires. N’imaginez pas des installations du genre «boutique au milieu d’une allée au Carrefour Laval», non. Plus un genre de comptoir devant un genre de banderole…
Bonne nouvelle, je peux acheter une carte SIM juste pour avoir Internet sur mon cell africain (j’ai découvert après six semaines ici que je pouvais aussi partager ma connexion en wifi avec celui-ci, même s’il est «cheap» et donc avoir le wifi sur mon iPhone en tout temps). Génial!
Le gars me demande mon passeport pour compléter le contrat. Une fois la carte installée dans mon téléphone, je sors ma carte de crédit.
«Cash only», me dit-il.
Shit. Bon, alors où est le guichet? Évidemment, il était AVANT de passer les douanes. Je pars donc en courant pour y retourner. Un homme m’accoste. Je dois d’abord dire que je me méfie de tout le monde là-bas, parce qu’on m’avait un peu traumatisée avec plein d’histoires quand je suis allée au Brésil il y a trois ans. Il avait toutefois l’air «legit». Il m’a montré sa carte d’identification, me disant qu’il travaillait pour le ministère du tourisme. Il était aussi dans la zone sécurisée de l’aéroport. Il m’explique rapidement qu’il peut m’organiser un transport pour l’hôtel. Moi, j’avais l’intention de prendre Uber. La discussion se fait pendant que je marche vers le guichet. Lorsque j’arrive aux douanes – qui se trouvent ici à être un tourniquet avec un gardien qui surveille les allées et venues – je me souviens que j’ai laissé mon passeport au comptoir de cellulaires. Quelle. Conne. Erreur de débutante. Je me mets à paniquer et à m’imaginer en train d’appeler le consulat pour pouvoir me sortir de cette merde si le gars avait déjà disparu et revendu mon passeport…
L’homme du ministère du tourisme me fait remarquer que ce n’était pas prudent. Merci, pas besoin d’un sermon. Je réussis à repasser le tourniquet sans passeport et à courir vers les deux guichets ATM. Oh, quelle surprise, ils sont hors-service. Seule autre option? Retourner au Travelers’ choice. Et on est maintenant rendus à 10$ de frais surprises.
Heureusement, tout s’est bien déroulé et j’ai pu récupérer argent, cellulaire égyptien et passeport.
Le transport maintenant. L’homme me fait un discours expliquant que le ministère du tourisme a mis ce système en place pour assurer la sécurité des touristes qui se font de moins en moins nombreux et bla-bla-bla.
J’accepte de lui faire confiance. Je le suis jusqu’à son bureau. Et vous l’imaginez sûrement, par «bureau», j’entends table et chaise dans un cubicule avec aucune enseigne, rien qui pourrait me rassurer de la légitimité de toute cette affaire. Mais dans ma tête, j’hésite me sauver en courant en me disant que je me fais arnaquer et que je suis idiote, ou lui faire confiance parce que si tout cela était «stagé» pour me piéger, ça faisait pas mal de figurants et de complices dans l’histoire.
Il me demande en même temps si j’ai des visites d’organisées. Comme ce voyage était zéro planifié et que je n’avais absolument rien trouvé sur Internet pour les visites (ne cherchez pas de bus du genre hop on hop off, ça n’existe pas là!), ma réponse était non.
Il me propose donc qu’on vienne me chercher à l’hôtel le lendemain matin pour m’emmener visiter les pyramides, avec un guide et un chauffeur privés. Les prix étaient raisonnables et je ne devais pas tout payer tout de suite. Et si j’aimais l’expérience, on pourrait alors prévoir autre chose pour ma deuxième journée.
J’accepte, mais je reste tout de même craintive.
Il me mène à la voiture, me présente le chauffeur. Dans ma petite tête de paranoïaque, tout ce beau monde a l’air louche. Et s’ils étaient tous de connivence? Et si la voiture servait tout simplement à kidnapper une jeune fille naïve qui aura été la plus facile des proies?
Je m’assois à l’arrière de la voiture et je cherche sur Google la compagnie qui se trouve sur la carte d’affaires que l’homme m’a remise. Je ne trouve rien. C’est la panique. J’en prends même une photo, que j’envoie, accompagnée d’une description (inutile) de la voiture dans laquelle je me trouve, à une amie. Au cas.
Lorsqu’on arrive à la barrière pour sortir du stationnement, on s’arrête. De longues minutes. Je n’aime pas ça. Je demande pourquoi et on me répond que les rues sont toutes bloquées parce qu’un président en visite diplomatique doit arriver sous peu à l’aéroport.
Est-ce que tout ça peut faire partie d’un «set up» pour nous prendre tous, les autres touristes éparpillés dans les voitures et moi? Je regarde trop de films, c’est clair.
Cette attente, elle a duré plus d’une heure. Une heure à me demander si j'étais en sécurité ou pas. Et pendant ce temps, la nuit est tombée. Je comptais sur la lumière du jour pour me conforter. Elle n’y était plus.
Lorsqu’on est enfin partis, j’ai entré dans le GPS de mon téléphone l’adresse de mon hôtel, pour savoir si c’est bien là où on allait.
Quel soulagement quand je suis enfin arrivée à l’hôtel, près de quatre heures après que mon avion eut touché le sol! J’ai paniqué pour rien, comme ça m’arrive souvent.
Reste que je craignais quand même le lendemain matin. Et si personne ne se pointait? Et si tout ça était juste pour me mettre en confiance afin de là, me kidnapper? Je me tapais moi-même sur les nerfs avec ma paranoïa.
Finalement, tout était ben correct.
J’ai eu droit à une visite guidée personnalisée, car j’avais un guide à moi toute seule. Et mon chauffeur m’a suivie partout tout au long du voyage.
Et une fois que j’ai compris que je pouvais avoir confiance en eux, je ne me suis plus inquiétée pour ma sécurité. Et je me suis trouvée un peu nouille d’avoir eu si peur au début. Il y a aussi la «police du tourisme» qui est partout dans les lieux touristiques. On vérifie les véhicules, on prend en note la nationalité des touristes à bord et on prend la matricule du guide. Et on nous demande même si tout va bien, tout en étant prêt à intervenir si la réponse est non!
Et puis, on oublie tout ça quand on se retrouve, sur le dos d’un chameau, devant ça :
Pour ce qui est des pyramides, eh bien ce sera pour un prochain blogue!