mercredi 5 août 2015

L'univers «artistiquement morbide» de la corrida (bullfighting)

Jenny a proposé d’aller visiter l’arène de Madrid, la plus reconnue de toutes. Dès que ça touche au monde du sport, du spectacle ou de la culture, je suis partante. Et comme celle-ci est un mélange des trois, je n’allais certainement pas dire non!

Je dois l’avouer, je ne connaissais à peu près rien à la culture de la corrida avant de mettre les pieds à Madrid. Tout ce que je savais, c'est qu'en anglais, on dit «bullfighting» et disons que ça sonne un peu plus «méchant».

(Faut dire que pour moi, «Corrida» = vieille chanson de Mitsou sur laquelle je dansais en cachette dans mon salon au primaire, mais ça, c’est une autre histoire!)

Commençons la visite par l’extérieur. Cette arène est magnifique :
L’architecture est mi-latine, mi-arabique, ce qui représente bien les origines des gens de la région.
Tout juste à l’extérieur, il y a une statue d’un matador. Celui-ci est mort à l’âge de 21 ans parce qu’un taureau a littéralement «brisé son cœur». Dans le sens qu’il l’a transpercé…

Puis l’autre statue, c’est étonnamment celle de l’inventeur de la pénicilline, Alexander Fleming. Le rapport avec la corrida? C’est qu’il a sauvé des centaines de vies avec son médicament. Avant cela, les matadors mourraient après avoir attrapé une bactérie dans leurs minuscules coupures causées par les cornes, qui sont extrêmement pointues.
À l’intérieur, on a la liste des matadors qui ont marqué l’histoire. Je n’ai pas trop compris le truc des oreilles, mais je crois qu’ils gardaient celle de l’animal s’ils avaient été extraordinaires. Il est extrêmement rare d’avoir les deux oreilles.
Plus loin, on avait le nom des taureaux qui ont marqué l’imaginaire.
Notre guide, qui était tout simplement génial et parfois hilarant, n’aimait pas la traduction «bullfighting», car selon lui, c’est plutôt une danse, une forme d’art.

«On fait face à l’animal, on travaille avec lui pour montrer sa beauté et aussi la mort. Ce n’est pas un combat. Les deux font quelque chose de grandiose ensemble», nous a-t-il résumé, ajoutant que la cape permettait de dialoguer avec la bête.

Il a précisé que l’être humain était le seul à avoir un sens artistique et donc que la corrida permettait d’humaniser un peu les taureaux. «Transformer la brutalité de la nature», a-t-il dit. Ouais, je l’admets, il pouvait être intense. Il était vraiment très passionné et voulait nous transmettre cela. Il voulait que l’on comprenne le pourquoi de cet «art».

J’étais peut-être un peu ignorante, mais je ne savais pas qu’ils tuaient systématiquement l’animal après sa prestation. En fait, une fois qu’ils ont terminé, la foule est appelée à juger. Elle applaudit si c’était digne de mention, c’est le silence dans le cas contraire. Et à Madrid, les critères sont tellement élevés qu’un seul taureau a été sauvé (et donc applaudi) et c’était… en 1982. Il est devenu une légende, évidemment.

C’est donc un peu un rituel, un sacrifice. Pour le tuer, on lui plante une épée à l’arrière de la tête. Puis on le transporte au boucher et sa viande… est vendue. Cette partie dégoûtait vraiment beaucoup notre guide.

Pour lui, les taureaux étaient des héros. On se souvient des noms des meilleurs et on doit leur rendre hommage.

Un autre truc qui semblait le déranger grandement, c’est que la journée où on est allées, ils préparaient l’amphithéâtre pour y recevoir un spectacle, ce qui gâchait pas mal la vue :
Et avec sa candeur, notre guide a qualifié ça de «prostitution» de la part du stade. On a bien ri!

On a pu voir les taureaux. J’étais un peu triste à l’idée qu’ils allaient tous mourir. Car s’ils ne faisaient pas l’affaire – il y en avait beaucoup pour être certains d’en avoir un «bon» pour le spectacle, ils étaient quand même abattus. Aucune chance de retourner dans la nature!
Ce sont des bêtes élevées en liberté dans la campagne espagnole. En fait, la seule fois dans leur vie où ils ont vu des humains et où ils sont sortis de leur environnement, c’est lors du transport pour la ville. Et comme c’est un grand stress pour eux, ils se reposent dans les enclos durant plusieurs jours avant la représentation du dimanche.

C’est lors du transport de ces taureaux qu’est née la tradition – un peu idiote! – de courir devant eux dans les rues. Car pour les amener à l’arène, on fermait les rues pour les diriger au bon endroit. Et les gens se défiaient en courant devant. Disons que je n’ai pas trop de pitié pour ceux qui meurent de la sorte…

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